Oh la boulette…

Le commicerf Bubu et la commibichebiche Nouche accompagne et assure la
surveillance de ces dangereux séditieux que sont les gilets jaunes
durant leur déambulation citadine…

Manif du samedi, nous escortons les GJ dans leur marche hebdomadaire.
C’est Grenoble, c’est plutôt calme.
Rue bloquée par une ligne de CRS devant le bureau de l’indéputé de
l’inrépublique Émilie d’Enmarche, nous tentons de passer pour assurer la
sécurité au délà de la ligne. En rampant, ça ne passe pas, en se collant
au mur et se faisant tout petit, nous longeons le mur hyper bien
camouflé.e.s, mais proche du but, un truc haut métallique et froid nous
bloque ! Impossible de le forcer à l’épaule, en haut, en bas, au milieu,
ça ne passe pas… les GJ se marrent pendant que d’autres invectivent
les fdo pour leur violence d’état.

Puis arrêt devant le parvis du musée de Grenoble avant les prises de
paroles pour dénoncer les violences policières, photos de blessés,
asques blancs aux yeux crevés. Ma partenaire clown et moi étions en BAD,
Brigade Anti DgiletDjaune, avec nos LBD (sarbacane en papier et
boulettes de papier) pour protéger la police et la population contre ces
méchants gilets jaunes, terroristes, Daesh des rues, qui osent réclamer,
dans notre parfait pays, justice sociale, fiscale, climatique et toutes
ces sortes de fadaises… bref, ils ont bien mérité tout ce qu’il leur
est arrivé ces gueux.

Donc, avec mon acolyte de brigade, nous montons sur la terrasse du très
chic bar du musée, prévenir les gens biens de se méfier de ce peuple en
liberté et que nous étions là pour leur crever les yeux et leurs
arracher des mains comme c’est prévu par le ministre, et financé par
leur impôts.
Forcement, avec nos sarbacane de mariage, on tire trop court et une
boulette de papier touche un jeune homme attablé avec son amie et un
autre couple. Le jeune s’énerve, me menace de se lever si jamais j’osais
le retoucher avec une telle boulette de papier. Dire cela à un clown…
forcement, l’occasion est trop belle de faire le crétin… je lui envoie
quelques boulettes sur la chemise. Il s’énerve, se lève, m’invective,
son ami se lève également et ils se campent devant moi, les deux
damoiselles regardent sans bouger ni piper mot, cette situation devant
sans doute se régler entre homme.
La scène, deux jeunes gens élégants, chemises, veste, lunette de soleil
ultra classe, moi avec mon nez rouge et mon costume de brigade à deux
balles. Je me fais insulter copieusement, gestes agressifs “nique ta
mère, j’vais t’casser la gueule, vient là-bas avec moi [il montre le
là-bas en question], j’vais te fracasse etc…” .
Je fais de mon mieux pour répondre avec calme et dignité “Je vous en
prie jeunes hommes, je vous interdit de m’insulter.” et ce genre de
choses. Puis une serveuse, super gênée, vient me demander timidement de
partir car son patron dit que j’embête la clientèle.
Fin de la scène.
C’est mon acolyte qui m’a raconté ce qu’elle a perçu de l’extérieur, une
magnifique scène de mépris de classe, dans laquelle le clown et le
ridicule n’était pas du côté que l’on croit.

Nous repartons avec le soutien des gilets jaunes, qui ne sont pas
intervenus dans notre scène à la boulette.
Le suite de la déambulation est plus calme, les fdo plutôt refroidis par
les photos des mutilés, les discours et les mises en scènes des GJ.
Après l’hommage aux mutilés et les discours qui l’accompagnent devant le
comico, nous montons en haut des escaliers rejoindre le commissaire pour
lui indiquer qu’il pouvait prendre sa journée avec ses hommes, que, la
commibichebiche et moi assurons la sécurité de la manifestation. Il
serait plutôt d’accord, nous lui proposons d’aller prévenir ses hommes.
Même s’il avoue ne pas reconnaitre nos cartes et nos grades, il accepte
que nous le fassions en son nom. Nous ne prévenons pas les fdo les plus
proches car l’ambiance est toujours aux hommages, et nous ne nous
sentions pas de débouler pour rompre ces instants.
Quelques minutes plus tard, nous longeons la cage aux fdo, là où ils
garent leurs chariotes et attendent les ordres. Nous stoppons et les
interpellons avec le plus grand sérieux, de l’autre côté du grillage
– commicerf Bubu
– comibichebiche Nouche
nous leur montrons nos cartes de commicerfbiche.
– vous pouvcez prendre votre année, c’est un message de votre chef, on a
demandé au ministre, ils sont d’accord.
La majorité s’en fout, deux, trois sourient et un gros costaud chauve et
patibulaire explose d’un rire franc et nous regarde en souriant des yeux
jusqu’au menton.
Cela détend bien l’atmosphère, certains s’avancent et nous leur montrons
notre attirail super moderne, le LBD de poche à boulette, nos
paprotection qui protègent pas etc…
Avant de partir, nous leur demandons les clef de leur véhicule, sur
ordre supérieur, et ils nous répondent qu’ils sont dans un sale état
leurs fourgons, comme la majorité de leur équipement.
Nous repartons déçus.

Arrivé devant la CCI, nous retronvons l’habituelle ligne de fdo, casques
et boucliers au clair.
Cette fois, pas de panneau pour nous bloquer, nous retentons la
technique de la longe du mur hyper discrète.
Comibichebiche reste au départ pour surveiller la scène pendant que le
commicerf arrive au contact du premier bouclier… ça bouge… un
système nerveu central semble activer leur système psychomoteur… ça
cogne un peu, je continue de longer le bouclier, personne n’a envi de
faire d’esbrouf et quelques retardataires GJ nous regardent en se
marrant. J’entends derrière le mur de bouclier “laissez le passer le
long de vous” et je continue, de dos, à longer le mur de bouclier que je
sens parfois bouger pour me porter d’un bouclier au bouclier voisin.
Ouf, une fois passé, un GJ vient nous dire que tout le monde est parti
et qu’il serait pas mal de rattraper les autres. J’entends un fdo dire
“allez, c’est ça, rejoignez le troupeau” et nous repartons vers la fin
de la marche.

Vive les boulettes !